TEXTE HUBIN;....DECEMBRE 2010.
INTRANQUILITES.
Curieuse peinture, se dit-on devant un
tableau de Geneviève Van der Wielen. Curieuse c'est peu dire. Et
cette capacité à surprendre le spectateur reste intacte en dépit
de constantes que l'habitué identifie : tons acides, contorsions,
surcharges et entrelacements des signes et, toujours, des
interrogations.
Curieuse peinture, très soignée dont
les personnages n'appartiennent pas à l'espace dans lequel ils
baignent ou bien sont comme surpris dans une activité intime à
première vue indéchiffrable ( amours ailés abattus par des pièces
de monnaie, chat emberlificoté par une marionnettiste, soeurs
siamoises se préparant à l'amputation).
Ce monde pictural est implacable. Il
est supérieurement organisé.....mais son ordre est celui d'une
mémoire : il est dépourvu de logique cartésienne. Onirisme, est-on
tenté d'avancer pour évacuer l'illogisme. L'empilement de signes
doit avoir un sens ; provocation, humour ? Fausses pistes (le
personnage en soutane qui dévide un chapelet prie-t-il pour l'âme
du prostitué ou pour son propre salut ? Qui est l'adulte qui
présente une fillette impubère ? ) On ignore où cette peinture
conduit ; avec elle il faut réapprendre à se laisser guider non pas
vers une réponse, vers une question.
Le trait noir cernant le sujet peint
c'est un noeud coulant. Il a rassuré le peintre confronté à la
toile encore blanche mais possède un sens : il affirme que rien
n'existe hors le cadre. Rien ne s'est passé avant, rien ne se
passera après. Aucun mouvement. Ce dont le tableau parle est
définitif, le trait noir étrangle la narration, il requiert le
spectateur de subir.
On s'étonne de l'usage fait de la
profondeur de champs. Le peintre respecte les règles de la
perspective mais attention : tel objet parce qu'il est éloigné n'a
pas moins d'importance que tel autre situé au premier plan : public
admirant les effets de musculature d'un culturiste amateur, cavalier
prenant la fuite, fenêtre entr'ouverte par où souffle un courant
d'air, fleur reliant la jeunesse à la mort, marionnette cassée,
trace d'un anonyme témoin en allé, miroir montrant la fuite du mâle
devant le risque des apparences, image sur l'écran de la
télévision......Premières clefs dont l'interprétation est
soigneusement laissée à charge du visiteur.
En dépit du manque de naturel, de la
sophistication, des postures exagérées, de l'absence de réalisme
des espaces, de l'importance des sentiments, cette peinture qui
s'emploie à tromper notre vision n'appartient pas au maniérisme qui
est, lui, vide de substance psychologique alors qu'ici les fardeaux
du psychisme sont obsédants. Le peintre est clair là-dessus : rien
n'est résolu. Ce monde fermé est paradoxalement un hymne à la
liberté.
La peinture de Geneviève Van der
Wielen aborde tous les rivages : ceux des conflits, des dressages,
des jongleries, des frustations, ceux des jeux, de l'ennui, des
danses, des ressentiments, les guerres des sexes et les amours tous
azimuts, la grossesse et la maternité, la paternité, les désirs,
les langueurs, les gourmandises et les cauchemars.
Elle parle de tout. Ele parle de nous.
Mais ce n'est, décidément, jamais une peinture tranquille.
MICHEL HUBIN (décembre 2010)
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lundi 24 mars 2008
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